Le chroniqueur Jean d’Auton relate les faits d’armes de Louis XII durant ses campagnes italiennes. Il témoigne, dans cet extrait, à l’occasion des fiançailles de Claude de France et de François d’Angoulême, fille du roi, d’une reconstitution de bataille à Plessis les Tours à laquelle participent les princes, les nobles et le roi lui-même.

         Apres les fiençailles faictes, les princes et seigneurs de France et autres gentishommes a grosses bendes se preparerent a faire joxtes et tournoys, dont, dessoubz le Plessix, pres le colliege des Bons Hommes, entre la muraille du parc et la riviere, furent faictes les lices. Ce jour, le Roy fist faire la montre de ses gentishommes entre la muraille du parc et la riviere, ou furent tous armez et montez, leurs chevaulx bardez et couvers de draps d’or et d’orfevrerye, dont plusieurs d’iceulx menoyent, les ungs XII grans chevaulx, les autres XIIII et les autres XX, tous chevaulx de prix et gorierement acoutrez, et eulx tous vestus de drap d’or et autres riches paremens. Ausi les quatre cens achiers de la gerde firent la leur monstre.

             Messire Guyon d’Amboise tint ce jour ung combat en foulle de XII gentishommes contre XII, desquelz il en menoit XII, et ung autre gentilhomme, nommé Mollart Suffray, les autres doze. Avecques eulx estoit ung nommé messire Françoys de Daillon, lequel avoit acecques luy quarante autres gentishommes, tous montez et armez a l’albanose et a la turque, lesquelz premier que assembler, firent leur descoeuvre, courses et escarmouches de chevaulx legiers en manière de mortelle bataille et guerre ouverte. Le Roy fist la mectre et atiltrer force grosse artillerye, qui, durant l’escarmouche, fut tirée et ruée contremont autour de la bataille, comme en maniere de donner sur les ennemys. Et, apres lesdictes courses et escarmouches, les gens d’armes des deux batailles, tous en foulle, adresserent les ungs contre les autres de telle roydeur que, au choquer, toutes les lances allerent par esclatz, et combatirent longuement, et tant que le Roy les fist depatir. Ce faict, le seigneur de la Crote, avecques ses chevaulx legiers, donne sur l’artillerye et luy et ses gens icelle gaignerent et enmenerent, en faisant toute la maniere de guerre mortelle. Ce que la Royne regarda, et les dames qui avecques elle estoyent, disant que c’est estrange chose que la guerre et merveilleuse a regarder.

Jean d’Auton, Chroniques de Louis XII, Paris, édition publiée pour la Société de l’histoire de France par R de Maulde la Clavière, 1889.